Cochrane, le parc National Tamango et une journée de stop les 26,27 et 28 Janvier 2012..

En descendant du bus à Cochrane, nous disons chaleureusement au revoir à Stéphane et Ju-Mi en espérant les recroiser un peu plus tard.. A l’office de tourisme, pour quelques infos.. Beaucoup de guanacos et de belles randos dans la vallée du Chacabuco et le parc du Tamango tous proches, mais côté transport c’est la désillusion.. Il n’y a simplement rien, pas un bus, pas un taxi, un chameau, une bicyclette, que dalle !! En stop ou à pied, ça promet.. Bon, on verra bien, en attendant, on veut bien poser nos bagages.. L’hospedaje sélectionné est à trois cuadras, une femme d’une cinquantaine d’année, nous accueille.. Toutes les chambres sont vides, aussi, elle nous propose la seule chambre avec lit double dans la cabane appart du fond du jardin.. Parfait, une jolie cabane rien que pour nous..
 
[…] Les rayons pénètrent par la large fenêtre accolé au lit, aussi la nonchalance ambiante (et les bières..) nous plongent dans trois bonnes heures de sieste récupératrices.. Nos vêtements sèchent dans l’allée, arrimés légèrement à la clôture en bois.. Une ambiance champêtre, proche de celle de la famille Ingalls, mais heureusement, le bois est déjà coupé.. Mauvaise nouvelle, les transports vers les autres villes sont rares eux aussi.. Il n’y en a en réalité qu’un par semaine, malgré les infos fournis à Tortel et à l’office de tourisme de Cochrane le matin même.. Le suivant, mercredi prochain, on est jeudi.. Merde !! On va tout de même pas passer une semaine ici.. C’est calme et assez sympa mais quand même.. Bref, la dame nous conseille d’aller poser une annonce aux radios locales, peut être que quelqu’un effectuant le voyage pourra nous y amener.. Mouais, je suis pas convaincu.. En attendant, nous grimpons jusqu’au petit point de vue de la ville où une inscription à la Hollywood a été installée.. Nous l’avons repérée le matin, et nous ne résistons pas à la tentation d’aller voir ça de plus près.. 10 minutes de grimpette et un beau panorama s’offre à nous, la ville au premier plan, la vallée très boisée au second.. L’inscription est cependant décevante, les lettres semblaient plus grosses d’en bas..


 
[…] Le lendemain.. Pleins d’énergie, nous voilà partis vers le parc National Tamango. On espère tout de même croiser une voiture qui pourra nous déposer à l’entrée du parc car ce n’est pas la porte à côté, six bornes.. Mais, nous ne croisons que peu de voiture et la seule rencontrée dans notre sens termine sa route seulement 50 mètres plus loin. Bref, on s’est rendu à pied jusqu’au parc, histoire de bien s’échauffer.. 
Arrivés à l’entrée, le garde du parc nous explique bien tous les chemins de randonnées qui composent le parc ; il nous indique également les endroits où nous pourrions avec un peu de chance, croiser des huemules, sorte de biche locale, emblême avec le condor du Chili, mais en voie de disparition.. Si c’est comme avec les toucans, c’est pas gagné.. Nous décidons donc de faire la première partie du chemin en poussant certainement jusqu’au début du lac et ensuite nous verrons bien.. La balade est assez agréable car nous cheminons le long du rio Cochrane nous offrant une jolie couleur bleu azur et une limpidité sans pareil. Surplombant le rio, nous jouissons d’un joli panorama en cette matinée ensoleillée.. 
Le parc est désert, personne, nous sommes très tranquilles.. Plus loin, nous apercevons la barque effectuant le liaison sur le rio, de l’entrée du parc au bout du Lago Cochrane, naviguant sur les eaux cristallines du fleuve qui donnent très très envie d’y plonger.. De la menthe sauvage parfume l’atmosphère près du ponton en ruine et de la barque en mauvaise posture.. Le sentier suivant parcourt 4km en deux heures, un peu trop pour nous si nous devons effectuer l’aller-retour.. Cependant, le mirador sur le lac Cochrane, indiqué sur la carte, ne semble pas bien loin.. Une rude montée abrupte d’une dizaine de minutes nous conduit à l’endroit espéré avec une petite blessure au doigt pour Bibou.. 
Deux bancs et une vue sur une bonne partie du lac et de la vallée, idéal pour déjeuner.. En contrebas, quelques îlots sont bordés par une eau claire, et l’on peut voir le fond sous des couleurs bleu blanc ou vertes, en fonction de la profondeur.. Un régal pour les yeux.. Après quelques minutes de repos, nous décidons de rebrousser chemin, rentrant par le même sentier.. Il nous manque un peu d’eau dans les gourdes, ayant pratiquement tout bu, je recherche la fraîcheur caressant les épis de blé comme Russel Crowe dans gladiateurs..

[…] Alors que nous parlons sans vraiment prêter attention à ce qui nous entoure, nous sommes soudain surpris par le saut élégant du grand huemule quelques mètres devant nous, croisant notre chemin.. Pas possible, un beau mâle avec ses bois, juste là, pas vraiment effrayé si bien que nous pouvons nous rapprocher à moins de 10 mètres.. 
C’est incroyable !! Bon, à y regarder de plus près, c’est juste un espèce de bambi local, une vulgaire biche mais ce qui rend cette rencontre plus précieuse, c’est sa rareté.. En plus, on en a souvent entendu parlé, dans d’autres parcs, nom de rue, hôtel, bateaux, restos et que sait-je encore.. Et enfin, le voici, paisible, broutant la mousse des écorces d’arbres.. En plus, il n’est pas seul, des bruits suspects proviennent des sous-bois.. En effet, apparaissent à leur tour, la femelle, et peu après leur rejeton.. La famille au complet.. A ce niveau-là, étant donné les conditions, c’est plus de la chance, on est juste CHAMPIONS DU MONDE !! Pendant plus d’un quart d’heure, nous les observons de près.. Le mâle s’étant couché, je m’approche tellement que j’aurais pu le toucher, et la femelle vient quant à elle carrément vers nous comme si nous n’étions pas là.. On mitraille forcément.. Puis, au bout d’un moment, il faut quand même les laisser en paix, ces pauvres petits huemules alors nous poursuivons notre chemin en gardant de magnifiques images de cette rencontre..

 

[…] Au réveil, très bonne nouvelle, la pluie a cessé et les nuages se sont dispersés.. Aussi pourrons nous faire du stop sans contraintes pour aller vers le nord.. La météo dit vraiment que de la merde à la télé.. Nous nous préparons rapidement, bouclons nos sacs avant d’aller en ville faire le plein de victuailles et retirer de l’argent.. Or, au distributeur, grosse déconvenue.. En effet, malgré le petit panneau Visa, impossible de retirer.. Merde.. On nous avait dit que c’était compliqué de retirer dans cette région, mais nous n’avons pas vérifié plus tôt.. Gros soucis car il nous reste 6000 pauvres pesos chiliens dans le porte-monnaie, environ 9 euros.. Plus du tout assez pour nous payer des billets ou que ce soit, si le stop ne marche pas, … Le supermarché ne prend pas la carte non plus, bien sûr.. On nous en indique pourtant un autre, un peu plus loin.. Victoire, ils prennent la carte.. On fait évidemment le plein de courses, au moins, on ne mourra pas de faim ces deux prochains jours.. A la caisse, je demande quand même à payer un peu plus avec la carte, et que l’on nous rende en billets, histoire d’avoir un peu de liquide.. Le patron accepte après quelques négociations en nous imposant une faible commission.. Bon, on a à manger et 50000 pesos, c’est pas l’eldorado, mais ça va un peu mieux..
 
[…] Nous chargeons nos sacs et sortons de la ville par la route direction nord.. Nous marchons un demi kilomètre avant de poser nos sacs au bord de la route, et entamer des cycles de 15 minutes de stop à tour de rôle.. Durant la première demi-heure, le trafic est plus important que je ne l’aurais imaginé.. Disons en gros une voiture toutes les 2 à 3 minutes en moyenne.. Aucune ne s’arrête pourtant, la plupart déjà chargées des familles sortant profiter du weekend dans les environs.. 
Pour passer le temps, j’écris à l’aide d’un bâton, nos possibles destinations sur la route de graviers.. Au bout d’une heure et demi d’attente, voilà que nous ne sommes plus seuls.. Un autre couple arrive, chargé comme des mules.. Nous les voyons avancer vers nous, heureusement ne se posent-ils pas un peu en amont, fairplay.. Arrivés à notre hauteur, ils nous disent bonjour brièvement, et suivent leur chemin.. Visiblement, deux techniques s’opposent.. Attendre patiemment arrêtés ou marcher pour avancer.. Pour nous, ce sera la première, je ne vois pas l’intérêt de s’éloigner de la ville si personne ne s’arrête pour nous prendre, nous pourrons toujours rebrousser chemin pour dormir à l’abris, surtout que le prochain village est à environ 50 bornes, beaucoup trop loin pour l’atteindre dans la journée.. Les voitures se font rares en fin de matinée.. Nous remarquons que beaucoup nous font un signe de la main, et repassent dans l’autre sens quelques minutes plus tard.. Je décide de répondre par ce même signe, qui consiste à tourner les index à la moulinette.. Une camionnette s’arrête et m’explique.. Cela veut dire qu’ils vont à la station-service située un kilomètre ou deux plus loin et qu’ils reviennent après.. Bon tant pis, on saura au moins ce que ça signifie.. J’en soupçonne quand même certains de tricher car ils ne repassent pas tous.. 
France est d’avis de marcher vers la station-service pour négocier sur place en face à face le stop.. Pas bête, mais cela signifie s’éloigner encore un peu plus de la ville.. J’aimerai pas y aller pour rien et répond que je ne bougerais d’ici que motorisé, pas têtu le garçon.. Peu après, j’arrête une autre camionnette avec le fameux signe et leur demande de nous déposer à la station-service.. C’est ok, mission accomplie !! Voilà deux heures de demi que nous patientons, et nous avons réussi à avancer de deux kilomètres, maigre butin.. 
Et ça ne fait que commencer car il est maintenant entre midi et deux, et les voitures se font encore plus rares, parfois, un bon quart d’heure ou 20 minutes sans aucun bruit de moteur.. Quinze heures, on désespère un peu et le doute s’installe.. Si on ne part pas rapidement, vu les distances, ce sera très compliqué d’avancer..  Pourtant, un 4X4 rouge entre dans la station.. Ils ne sont que trois à l’intérieur, vont dans la bonne direction et leur plate-forme arrière est vide.. Ces éléments réunis sont super rares, il va falloir tout donner.. Heureusement, ils ne sont pas difficiles à convaincre, ils poussent les cannes à pêches et la glacière placés à l’arrière et nous disent de nous installer.. YES !! C’est parti baby !! Nous voilà dans la benne d’un pic-up, voyageant cheveux au vent.. Un vieux cliché exaucé.. 

On se croirait à Pekin Express, ou plutôt, Puerto Tranquillo Express..  Un grand sentiment d’aventure nous submerge surtout que la route est encore une fois magnifique, bordée de montagnes passant du jaune paille au vert, serpentées par de  nombreux  cours d’eau.. Une petite demi-heure après notre départ, grande surprise car un guanaco traverse sur la route à peine 10 mètres sous nos yeux. Le chauffeur s’arrête  car les deux autres passagers sont en vacances et aiment prendre leur temps à notre grand bonheur.. 

 
A la confluence du rio Baker et Neff, le spectacle est saisissant.. Les eaux du rio Baker sont d’un bleu que nous n’avions pas encore vu jusqu’à présent. C’est le plus beau fleuve du Chili selon eux et l’occasion de nombreuses activités nautiques dans ses rapides. Au passage,  nous voyons sur le bord de la route, l’air très fatigués, le couple de chilien croisé le matin.. Nous les saluons au passage mais sommes, avouons-le, ravis de passer en tête.. Bon ok, il n’y a pas de compét mais s’il y en avait une, on serait devant et preuve est faite que notre technique était meilleure.. Espérons tout de même que quelqu’un s’arrête pour eux, car ils étaient alors au milieu de rien.. Discret High 5 de winner..

 

[…]  A l’embranchement, notre chauffeur nous dit de descendre ici car lui continue vers Puerto Guadal, sur la rive sud du lac.. J’avais pas compris ça et même si on a déjà bien avancé, il reste encore pas mal de route à faire avant Puerto Tranquillo.. Je lui demande alors son terminus avant de descendre les sacs, Chile Chico et nous optons finalement de rester à bord.. Restent alors 120 kilomètres de poussière supplémentaire.. 
Gros krakage du chauffeur, une dizaine de minutes plus tard.. Il embarque trois allemandes de plus.. On va être serrés à l’arrière, surtout qu’elles avaient bien planqué leurs gros sacs.. Elles s’entassent comme elles peuvent.. Impossible de bouger un orteil à partir de ce moment-là.. On discute un peu mais pas facile avec le vent.. Une demi-heure plus tard, j’ai mal partout, je décide de me lever.. C’est pas très recommandé, les gendarmes n’aimant déjà pas le transport de passagers à l’arrière, or sur cette piste, nous ne croisons personne.. Mais surtout, direct, c’est un grand kiff.. 
Debout, surplombant le toit du 4X4, de nouveau cheveux au vent, j’ai l’impression d’être le capitaine du navire.. De plus, j’ai une vue imprenable sur la route et les environs.. Je m’amuse comme un gosse, redevient un gamin.. Surtout sur cette « route » sinueuse en bord de lac, entre mer et falaise, au milieu des rochers.. Je passerais les deux heures restantes ainsi adossé à la carrosserie.. A l’arrière, les filles ont plutôt froid, c’est l’heure du crépuscule, mais moi, je pourrais avaler ainsi des milliers de kilomètres, malgré que le vent m’arrache parfois quelques larmes.. Je suis au paradis, certain de garder ce moment magique, longtemps dans ma mémoire..  Après six bonnes heures de route, et 240 kilomètres de piste, nous apercevons enfin les lumières de Chile Chico.. Ils nous déposent tous dans la rue principale en face de la place centrale, et nos routes se séparent après les avoir chaleureusement remerciés..


 

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