La Junta et El Chaitèn les 04 et 05 Février 2012..

A peine le temps de faire une petite sieste que nous voilà débarqués dans un village, au milieu de nulle part, sur le bord de la route australe.. Bienvenidos à La Junta.. Côté logement nous opterons pour la solution la plus économique, c’est-à-dire le camping, notre bus pour Chaiten partant le lendemain à 6h du matin. 
 

La bonne nouvelle, c’est que c’est jour de fête à la Junta. Au programme, rodéo avec de vrais cowboys ! Nous nous dirigeons vers l’arène où le spectacle va bientôt commencer. On ne sait pas trop ce qu’on n’est venu voir, ni vraiment ce que nous faisons là, visiblement les seuls européens de la centaine d'individus de l'assemblée.. Plus "Chili profond" impossible.. Je sens déjà que ça va nous plaire.. Nous avons mis du temps à comprendre les règles du jeu mais ça donne à peu près ça.; Deux cavaliers doivent poursuivre un veau et essayer de le coincer à des endroits stratégiques leur rapportant des points.. 
C’est le principe de base.. Mais, en réalité, ça s’avèrent plus compliqué que ça n’y parait et surtout bien plus marrant. Car parmi les veaux, il y a des rebelles, voir même des têtes brulées ; certains feintent, d’autres passent carrément par-dessus les barrières, les chevaux peinent dans la boue, glissent souvent et le spectacle est assuré.. Les cavaliers sont vraiment doués, ils ont une maîtrise complète de leur cheval et rien que pour ça je leur tire mon chapeau.. En parlant de chapeaux, le leur, plat à larges bord, Xabi leur envie.. Je ne suis pas sûre que ça lui aille aussi bien qu'à eux, avec leurs habits traditionnels dont le fameux poncho.. Nous nous laissons prendre par le spectacle et serions bien restés plus longtemps pour les autres compétitions mais le froid nous glace.. 
    
 

[...]  Chaltèn.. C’est une ville en totale reconstruction, après l’éruption du volcan voisin en 2008 et l'énorme raz de marée qui ravagea la ville peu après.. En descendant du bus, nous nous informons tout d’abord sur les conditions d’embarquement car le port a été détruit et les informations du guide très floues.. Un nouveau port sommaire a été construit un peu plus au nord, non loin de la ville.. 

 
Peu d’habitants sont revenus dans la ville, et les hébergements sont rares.. On demande à l’entrée d’un resto, la dame nous répond qu’elle dispose de quelques chambres et son mari nous accompagne dans une petite maison à l’arrière d’une cour.. C’est neuf, enfin pas vraiment fini, mais propre et nous sommes seuls malgré les 4 ou 5 chambres.. Nous en choisissons une à l’étage.. Un couple de chilien rencontré la veille au soir, nous a décrit la ville encore très en désordre, notamment dans le secteur proche du lit de la rivière..

En effet, des maisons à l’abandon jonchent les rues, d’autres plus loin sont carrément recouvertes de tonnes de gravats et de cendre.. La cendre, lors de l’éruption a formé un bouchon bloquant la coulée des eaux du glacier voisin.. L'eau s'est accumulé, surtout que le glacier a fondu, et lorsque le bouchon a sauté sous la pression de l'eau quelques jours plus tard, celles-ci ont formé un raz de marée qui a tout emporté sur son passage.. Le nombre considérable de gravats a même fait reculé la mer d’une bonne centaine de mètres à l’embouchure du fleuve.. C’est pourquoi le nouveau port se trouve maintenant un peu loin.. Une ambiance bizarre donc, des rues désertes, partout de la désolation, même les bâtiments publics ont été abandonnés.. 
Un air de reportage de Nouvelles Orléans après Katherina en se promenant dans les rues.. Pas grand-chose à faire à part constater les dégâts, sous une poignée d’aigle et de vautours tournoyant sans relâche dans le ciel .. Pas très bonne ambi  tout ça, une atmosphère gagnée partout par le gris.. Certains pourtant s’attèlent à la tâche pour reconstruire, ou finir de dégager les trottoirs ou les rues.. Car, plus de trois ans après, nombreuses sont les maisons encore enfouies sous les gravats, donc pour certaines, seul le toit dépasse.. 
 
[...] Une petite frayeur dans l'après midi.. Nous voilà confortablement installés au chaud sous la couette,  lorsqu'un hélicoptère trouble notre tranquilité.. Il rase le village dans un écho effroyable, malgré le mauvais temps et les bourrasques.. Bizarre, mais nous n’y prêtons pas plus attention.. Pour l'instant.. Quelques minutes plus tard, nous sauterons littéralement du lit, alertés par le long rugissement d’une sirène.. Au rez-de-chaussée, les proprios sortent précipitamment de la maison, ce qui ne nous rassure pas davantage.. Nous avons vu et parlé de volcan, d’éruptions et constaté les dégâts toute la matinée, cette sirène accélère très vite notre rythme sanguin.. On se rhabille donc en moins de temps que je ne mets pour l’écrire, et sortons sous la pluie même si les nouvelles se veulent rassurantes.. En tout cas pour nous.. 
C’est un incendie qui s’est déclaré à deux cuadras de chez nous.. Nous voyons les lumières des camions de pompiers scintiller et de nombreux badauds sur le trottoir.. L’appel de la curiosité nous attire près du sinistre.. Nous observons avec un léger amusement les techniques des pompiers chiliens qui semblent pas vraiment au point.. (Frédo, on espère que tu fais mieux que ça..) L’hélicoptère est bel et bien là, dans le jardin à l’arrière, mais il n’y heureusement pas eu de blessés.. Pour notre part, on repart à l’abri, trempés par ces quelques instants d’intempérie, le pouls enfin calmé.. Décidément, Chaltèn se sera montré déserte, inhospitalière à la limite de l’hostilité.. Enfin, pas ses rares habitants heureusement mais le temps et le panorama ne sont pour une fois, la première sans aucun doute du voyage, pas de la partie.. 
C’est pourquoi ce soir là, je suis seul à sortir profiter du coucher de soleil.. Bibou préfère rester au sec, et n’a pas faim, ce qui en fait une des raisons principales de mon saut à l’extérieur.. La ville est tout aussi vide, triste, mais en plus artistique avec ses quelques lumières communales blanches et jaunes.. La sandwicherie repérée plus tôt, la panaderia Javi est fermée, pas de bol.. On m’indique un stand de sandwich un peu plus loin.. Je commande un completo, hot dog tomate, fromage, palta (avocat ecrasé..), mayo.. Un sandwich très savoureux connus à Coyhaique.. En même temps, ils vendent que ça et des frites mais deux gars servis devant moi, ont commandé les dernières.. Fairplay, il m’en propose quand même quelques-unes pendant que j’attends mon maigre repas.. 
C’est ainsi que j’entame la conversation avec ces deux gars, là devant cette baraque à frite chilienne.. Le premier est prof de musique, un tantinet allumé mais très sympa, l’autre géomètre et tous deux travaillent pour quelques semaines dans les travaux des environs de goudronnage de la route australe.. Pas cool, je l’aime bien en ripio (graviers) cette route moi, plus sauvage, un côté aventure bout du monde mais bon.. On parle de choses et d’autres même si les thèmes récurrents sont le voyage, les différences entre l’Europe et l’Amérique du Sud et la politique.. Je sèche sur la musique et passe mon tour.. Après une heure de discutions dans la rue, ils m’invitent dans le bar voisin pour boire une bière et poursuivre cet échange plus agréablement installés.. Bibou m’attend sûrement, je refuse d’abord puis accepte à condition de la boire rapidement.. On sait très bien que ce genre de situation déborde toujours, et c’est presque une heure plus tard que je reprends finalement la route de l’hôtel.. J’en ai appris beaucoup sur le Chili, et cette région, en deux heures, le tout dans la bonne humeur et la convivialité, tout ça, à cause d’une histoire de frites..

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire